Fiscalité personnelle


Publié le 13 févr. 2024 par Denis COLIN & Alexandre ANDRE

Les revenus fonciers imposables

Le revenu locatif imposable

Le revenu foncier est composé de loyers perçus de biens immobiliers mis en location, que ces biens immobiliers soient meublés ou non. Le revenu tiré de la location d’un bien immobilier situé au Luxembourg est déterminé d’après la règle suivante : revenu imposable = loyers encaissés – frais d’obtention.

Seules les recettes effectivement encaissées et les dépenses effectivement payées sont pris en considération (par exemple une facture reçue mais qui n’est pas payée n’est pas déductible).

Les frais d’obtention regroupent principalement :

  • L’amortissement ;
  • Les dépenses d’entretien et de réparation ;
  • Les intérêts ;

Les frais d’obtention restent déductibles même si les recettes font passagèrement défaut (par exemple parce que le bien immobilier subit des rénovations entre deux périodes de location ou tarde à trouver un locataire).

L’amortissement

La base d’amortissement

L’amortissement correspond à la perte de valeur économique de la construction.

La base d’amortissement est normalement constituée du prix d’acquisition de l’immeuble (hors prix du terrain) augmentée des frais d’acte (c’est-à-dire les frais de notaire sans toutefois prendre en considération les frais liés de l’éventuel prêt hypothécaire comme par exemple les frais d’ouverture de crédit) et des dépenses d’investissement (c’est-à-dire les travaux visant à conférer une valeur significative supplémentaire à l’immeuble).

Lorsque le prix du terrain n’est pas distingué dans l’acte notarié d’achat, on retient forfaitairement 20%, sauf circonstances particulières de l'immeuble.

Les frais d’acte doivent être ventilés entre le terrain et la construction

Exemple : un contribuable achète un bien immobilier 800.000 EUR et paie à cette occasion 80.000 EUR de frais de notaire. La base d’amortissement du bien sera (800.000 + 80.000) x 80% = 704.000 EUR.

La base d’amortissement des biens immobiliers recueillis par donation ou par succession (c’est-à-dire à titre « gratuit ») est le coût d’acquisition supporté par le dernier acquéreur à titre onéreux.

Les biens achetés avant 1941 peuvent être évalués au triple de leur valeur unitaire.

Le taux d’amortissement

Le taux d’amortissement de l’immeuble dépend de l’utilisation qui en est faite1.

Pour les immeubles affectés au logement locatif, la situation dépendra selon que l'immeuble a été acheté avant ou après le 1 janvier 2021.

Immeubles à usage de logement acquis (ou constitués) avant le 1er janvier 2021

  • si l’achèvement remonte à moins de 6 ans: 6%
  • si l’achèvement remonte à plus de 6 ans: 2%

Immeubles à usage de logement acquis (ou constitués) après le 1er janvier 2021

  • si l'achèvement remonte à moins de 5 ans: 4%
  • si l'achèvement remonte à plus de 5 ans : 2%

Lorsque le taux d’amortissement de 4% trouve à s’appliquer, le contribuable a en outre droit à l’abattement immobilier spécial2, d’un montant de 1%, sans toutefois que le montant de cet abattement ne puisse dépasser 10.000 € par an (doublé en cas d’imposition collective). Etant donné qu’il s’agit d’un abattement d’impôt, celui-ci sera automatiquement appliqué par le bureau d’imposition qui fixe la cote d’impôt du contribuable si les conditions d’applications sont remplies.

Immeubles à usage de logement acquis en 2024

  • 6 % pendant 6 ans, à condition que l'immeuble construit en vue de sa location et vendu en 2024, dans la limite de 250 000 €
  • 2 % ensuite

Pour les autres immeubles que ceux affectés au logement

  • si l’achèvement < 30 ans : 1,5%
  • si l’achèvement est compris entre 30 et 60 ans : 2%
  • si l’achèvement > 60 ans : 3%

Les bâtiments industriels et hôteliers sont toutefois exclus de ce régime d’amortissement forfaitaire et doivent être amortis sur leur durée d’utilisation.

Dans chacune des situations, lorsque le bien est acquis en cours d’année, le montant de l’amortissement est adapté prorata temporis.

Pour les immeubles acquis avant 1941 et évalués au triple de leur valeur unitaire, le taux d’amortissement à retenir est de 2,5%.

Il convient de bien remarquer que l’amortissement n’est pas limité dans le temps et s’opère aussi longtemps que le bien immobilier est donné en location.

Il convient également de de bien observer que, dans tous les cas, le déterminant n’est pas la durée de détention, mais l’âge de la construction.

Les frais d’entretien et de réparation

Ces frais correspondent aux dépenses engagées pour maintenir l’immeuble en bon état (peinture, réparation du toit, de la façade, etc…).

Ces dépenses sont à distinguer des dépenses d’investissement qui ont elles pour objet de conférer une valeur significativement supérieure à l’immeuble, soit en changeant sa nature (transformation d’un bureau en logement par exemple), soit en apportant des améliorations sensibles (installation d’un ascenseur par exemple), soit en agrandissant l’immeuble (aménagement des combles par exemple).

L’administration estime que l’on est a priori en présence de dépenses d’investissement lorsque le total des dépenses représente plus de 20% de la valeur d’acquisition de l’immeuble.

Alors que les dépenses d’entretien sont déductibles l’années où elles sont payées (sauf demande d'étalement), les dépenses d’investissement seront elles constitutives de la base d’amortissement de l’immeuble et elles seront donc déductibles au titre de l’amortissement. Le taux d’amortissement des dépenses d’investissement est en principe celui de l’immeuble, sauf :

  • Lorsque ces dépenses d’investissement dépassent 20% du prix d’acquisition de l’immeuble, le contribuable peut amortir la dépense d’investissement au taux de 4% aussi longtemps que l’achèvement des travaux ayant donné lieu à la dépense d’investissement remontent à moins de 5 ans (puis il appliquera le taux de 2% au titre des années suivantes).
  • Lorsque la dépense d’investissement correspond à des travaux de rénovation énergétique durable, le contribuable peut amortir cette dépense d’investissement au taux de 6% aussi longtemps que l’achèvement des travaux remonte à moins de 9 ans.

S’agissant des dépenses d’entretien, le contribuable peut toutefois demander que ces dépenses soient (sauf demande d'étalement), étalées  sur 2 à 5 ans lorsqu’elles représentent plus de 50% du loyer annuel perçu. S’il advenait que l’immeuble soit finalement affecté à la résidence principale du propriétaire, la partie étalée non déduite reste déductible sur la durée d’étalement. En revanche, si l’immeuble est vendu, la partie étalée non déduite devient intégralement déductible l’année de la vente.

La déduction forfaitaire

Le contribuable a la possibilité d’opter pour une déduction forfaitaire de 35% du loyer perçu en place et lieu des dépenses d’amortissement et des frais d’entretien et de réparation dès l’instant où l’immeuble donné en location est achevé depuis au moins 15 ans.

Cette déduction est toutefois limitée à 2.700 EUR par an et par immeuble, ce qui de fait revient à exclure tous les biens procurant un loyer supérieur à 650 EUR par mois (ce qui est très souvent le cas au Luxembourg). Si le contribuable a opté pour cette méthode forfaitaire et qu’il décide finalement d’en revenir au décompte réel, c’est tout à fait possible mais le contribuable devra alors attendre 15 ans avant de nouveau pouvoir mettre en œuvre la méthode forfaitaire.

Les intérêts

Les intérêts payés au titre d’un prêt pour un bien immobilier donné en location sont déductibles sans limitation.

Il en va de même pour les frais accessoires de financement tels que les frais de dossier de financement, les frais d’acte hypothécaire, les commissions bancaires, etc.

Les intérêts relatifs à la résidence principale sont eux en revanche plafonnés (plafonds à compter de 2024) :

  • 4.000 € pour les 6 premières années d’occupation (3.000 € jusqu'en 2023)
  • 3.000 € pour les 5 années suivantes (2.250 € jusqu'en 2023)
  • 1.500 € pour les suivantes (1.500 € jusqu'en 2023)

Ces plafonds sont majorés du même montant pour le conjoint et chaque enfant.

La limitation à la déductibilité des intérêts peut, pour partie, être contourné par la bonification des intérêts par l’employeur.

Jusqu'au 31 décembre 2022, les interêts étaient déductibles aussi longtemps que l'habitation n'est pas habitée par le propriétaire (dans une limite usuelle de 2 ans). Depuis le 1er janvier 2023, la déduction des interêts sur la résidence principale est plafonée dès l'acquisition du logement (à moins que l'habitation ne soit pas achevée ou dans un état de délabrement tel qu'elle ne peut être qualifiée d'habitation2.

La prime unique pour une assurance « solde restant dû » contractée à l’occasion de l’achat de l’acquisition d’une résidence principale est déductible selon un plafond spécifique (plafond de 6.000 EUR augmenté de 1.200 EUR par enfant à charge et de 8% par année au-delà de la 30ème).

L’imposition du revenu foncier

Le revenu foncier ainsi déterminé est ensuite cumulé aux autres catégories de revenu (salaires, etc…) puis soumis au barème général de l’impôt. Ainsi, en cas de revenu négatif, ce déficit foncier est imputable sur les revenus des autres catégories de revenu.

Notons cependant une optimisation intéressante possible : le revenu de location en provenance d’une organisation conventionnée exerçant la gestion locative sociale est exonéré à hauteur de 90%.

 


1Règlement grand-ducal du 19 décembre 2020 modifiant le règlement grand-ducal modifié du 19 novembre 1999 portant exécution de l’article 106, alinéas 3 et 4 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu (base d’amortissement forfaitaire et taux d’amortissement pour immeubles locatifs).

2Circulaire 105/8 - 38/1