Fiscalité personnelle


Mis à jour le 27 août 2018 par LPG

Les prélèvements sociaux français pour les non-résidents

Définitions des prélèvements sociaux en France

CSG (Contribution sociale Généralisée), CRDS (Contribution pour le Remboursement de la Dette Sociale) et autres contributions de solidarité instituées en France à partir de 1990, ont été définies comme des impôts affectés exclusivement au financement de la sécurité sociale. Cette dualité de définition a posé et pose toujours de nombreuses questions qui ne sont pas encore tranchées.

En France, le Conseil Constitutionnel (interrogé sur la constitutionalité des lois de finances qui ont introduit ces contributions) suivi par le Conseil d’Etat considèrent qu’il s’agit d’un impôt. Pour l’Union Européenne, par l’intermédiaire de la Cour de Justice ces contributions sont en revanche des cotisations sociales. La cour de Cassation en France suit cette définition car le droit communautaire prévaut sur le droit interne.

D’où un imbroglio certain et un traitement différent selon la nature des revenus où il est parfois difficile de se retrouver.

Non-résidents réalisant la totalité de leurs revenus en France

Par un arrêt du 14 février 1995 la CJUE a décidé que les non-résidents doivent être assimilés à des résidents lorsqu’ils perçoivent la totalité ou au moins la quasi-totalité de leurs revenus de l’Etat concerné. Ils sont donc soumis aux mêmes prélèvements que les résidents français.

Non-résidents ayants des revenus d’activité en France et travailleurs frontaliers

Lors de l’introduction de la CSG en 1990, la loi de finances avait décidé que toutes les personnes physiques ayant leur domicile en France devaient payer cette contribution sur leurs revenus et cela, quel que soit le pays où ces personnes travaillaient.

Par un arrêt du 15 février 2000 la CJUE a jugé que ces dispositions étaient contraires à l’article 13 du règlement (CEE) qui prévoit l’assujettissement à une seule législation sociale des travailleurs migrants, excluant de ce fait le paiement des contributions sociales sur les revenus d’activité ou de remplacement pour les non-résidents ou les travailleurs frontaliers.

Condamnée, la France a donc fait machine arrière sur ce point et ne prélève plus de contributions sociales sur les revenus d’activité (ou de remplacement) pour les non-résidents ou les travailleurs frontaliers, et a corrigé ses textes dans ce sens soumettant l’assujettissement aux contributions sociales à la double condition d’être domicilié fiscalement en France et d’être à la charge d’un régime obligatoire français d’assurance maladie.

Les revenus du patrimoine 

Dans son article 29, la loi de finances 2012 étend les prélèvements sociaux aux revenus fonciers et aux plus-values immobilières reçus en France par des non-résidents, avec effet au 1er janvier 2012 pour les revenus fonciers et 17 août 2012 pour les plus-values.

La raison invoquée par le gouvernement français pour étendre les prélèvements sociaux aux non-résidents est la volonté d’établir l’égalité de traitement entre les redevables de l’impôt (pour l’administration française, les prélèvements sociaux sont toujours des impôts, voir ci-dessus).

D’où la vive réaction des non-résidents forts de la décision du 15 février 2000 et l’ouverture d’une procédure d’infraction contre la France par la Commission Européenne (procédure 2013/4168), procédure bloquée par le Conseil d’Etat par une saisine de la CJUE. Le jeu de ping-pong va se poursuivre au moins jusqu’à l’arrêt de la CJUE. (Affaire de Ruyter)

Après la condamnation de la France Le 26 février 2015 par la CJUE et la confirmation de cette condamnation par le conseil d’Etat le 27 juillet 2015, le ministère des finances a publié le 20 octobre 2015 un communiqué de presse indiquant les personnes et les revenus concernés, les périodes susceptibles de remboursement et les modalités de dépôt des réclamations. 

Tout se passe comme si le ministère des finances ne voulait pas vraiment rembourser ces taxes. Il n’y a pas de de remboursement automatiques prévus mais l’introduction d’une réclamation demandant en particulier de fournir de nombreux justificatifs, parfois imprécis.  

Le recours à un professionnel pour introduire cette réclamation et son suivi semble quasiment indispensable, et rend la réclamation dissuasive pour les petits montants.
Enfin, il est toujours possible que le Gouvernement français formule de nouvelles propositions de réforme, son intention étant de réintroduire cette taxe en 2016 pour les non-résidents en modifiant l’affectation de façon à échapper à la censure de la CJUE.

Les revenus financiers

Pour l’instant, les revenus financiers échappent pour les non-résidents aux prélèvements sociaux français et cela parce que les conventions fiscales prévoient généralement que les revenus financiers soient imposables dans le pays de résidence du contribuable.

En résumé la question des prélèvements sociaux français à l’encontre des non-résidents français pose 2 questions fondamentales non encore complètement éclaircies par la France :

  1. Ces prélèvements sont-ils des impôts ou des charges sociales ?
  2. Les principes égalitaires du droit fiscal français sont-ils devenus supérieurs aux conventions fiscales signées et donc aux engagements antérieurs de la France ?