Le premier janvier 2018 a marqué la mise en application d’une importante réforme fiscale1 qui modifie notablement l’organisation comptable et fiscale des professions libérales. Auparavant, une circulaire du directeur de l’Administration des Contributions Directes permettait à l’ensemble des professions libérales de déterminer leur bénéfice imposable à l’aide d’une comptabilité simplifiée. Désormais, les professionnels dont les recettes dépassent 100.000€ doivent mettre en œuvre un système plus élaboré dit de « comptabilité en partie double ». Seuls les praticiens qui ont un revenu professionnel inférieur à 100.000 € par an pourront continuer à utiliser le système simplifié.
Qui sont les professions libérales ?
Aucune définition exhaustive des professions libérales n’est fournie par la loi fiscale2. Celle-ci fournit une liste d’exemples dont on peut tirer une règle : « l’ensemble des professions intellectuelles exercées à titre indépendant » qui peuvent être :
- Les professions juridiques (avocat, notaire…) ;
- Les professions médicales (médecin, kinésithérapeute…) à l’exception des pharmaciens qui sont rangés parmi les commerçants ;
- Les professions libérales avec autorisation d’établissement (géomètre, architecte, expert-comptable…) ;
- Les professions libérales hors autorisation d’établissement (statisticien, politologue, psychanalyste…).
La comptabilité simplifiée
La comptabilité simplifiée consiste simplement à additionner les recettes encaissées puis à soustraire les dépenses payées pour en déduire le bénéfice à soumettre à l’impôt. Dans la pratique, la comptabilité en partie simplifiée signifie que3 :
- Toutes les entrées d’argent sont des recettes (sauf les prêts) ;
- Toutes les sorties de fonds sont des dépenses (sauf les investissements et les remboursements de prêt) ;
- Un seul ajustement est à opérer : les amortissements.
La condition principale pour pouvoir bénéficier de ce régime est de réaliser moins de 100 000€ de recette, mais aussi :
- L’actif investi ne doit pas être supérieur à 1.5 fois les recettes ;
- L’actif ne doit pas varier significativement d’une année à une autre ;
- Le professionnel ne doit pas être en situation de céder ou cesser son activité, auquel cas, il doit obligatoirement utiliser le système de comptabilité en partie double.
La comptabilité en partie double
Tous les praticiens qui ne remplissent pas les conditions du régime simplifié relèvent du régime de la comptabilité en partie double.
La comptabilité en partie double est une organisation comptable où chaque écriture dans un compte doit trouver une contrepartie symétrique dans un autre compte. Ainsi, par exemple, une écriture correspondant à l’emploi d’une somme d’argent (un paiement bancaire) devra trouver sa contrepartie dans une écriture correspondante (la diminution d’une dette fournisseur par exemple).
De la sorte, tout montant porté en comptabilité sera transcrit deux fois : une fois au débit d’un compte, et une seconde fois au crédit d’un autre compte, ce qui permet concrètement de suivre la trace de toutes les opérations de l’activité économique. Les évènements sont enregistrés au moment où ils se produisent et pas au moment du paiement. Ce système est en fait celui utilisé par les entreprises et les commerçants. Son avantage, pour l’administration, est de permettre de mieux identifier et suivre les flux de l’activité lors d’un contrôle.
Les exceptions de mise en œuvre de la comptabilité en partie double
Pour les professionnels qui dépassent de manière exceptionnelle le plafond de 100 000€, il est possible de faire une exception au passage à la comptabilité en partie double dans le cas où le dépassement est non durable et non significatif4. Cette exception suppose de manière supplémentaire l’accord du préposé du bureau d’imposition.
Appréhender le passage du bénéfice simplifié au bénéfice normal
Dès l’instant où le professionnel dépasse le plafond de 100 000€, il est obligatoire de mettre en œuvre une comptabilité en partie double. Ce changement peut avoir des conséquences lourdes sur les contribuables concernés, puisque dans certains cas cela peut faire augmenter de manière significative leur charge fiscale. En effet, s’ajoute à la fiscalité des recettes encaissées, la fiscalité des prestations facturées et non encore encaissées. Toutefois, si l’augmentation d’impôts résultant du changement de méthode fiscale est importante, la charge fiscale supplémentaire peut être étalée sur 4 ans maximum.
Cas de retour à la mise en œuvre de la comptabilité en partie simple
Pour un professionnel qui repasse durablement en dessous de 100 000€, le retour au système simplifié est possible après l’accord du préposé du bureau d’imposition qui constatera le passage durable en deçà du seuil.
1 Art 161 AO (Loi Générale des Impôts) modifié par la loi du 23 décembre 2016 portant mise en œuvre de la réforme fiscale.
2 Art 91 LIR
3 Source : Règlement grand ducal du 3 décembre 1969 instituant un mode simplifié de détermination du bénéfice
4 Circulaire L.G-A n°63 du 15 septembre 2017