Droit des sociétés


Publié le 26 févr. 2024 par Florian DESTREMONT

Les emprunts obligataires

Dans l'écosystème financier du Luxembourg, l'emprunt obligataire se distingue comme un mécanisme de financement efficace pour les entreprises. Cette méthode, fondée sur l'émission de titres de dette qui assurent le remboursement du capital emprunté, avec ou sans intérêts, offre un levier stratégique pour le développement des activités des entreprises.

Toutefois, au sein de la diversité des structures d’entreprises luxembourgeoises se dessine une interrogation sous-jacente : l’accès pour les sociétés aux emprunts obligataires n’est pas uniformément réparti.

Qu’est-ce qu’une obligation ?

Une obligation est un instrument financier sous forme de titre de créance, émis soit par une société privée, soit par une entité publique telle qu'un gouvernement ou une municipalité.
L'émetteur d'une obligation est l'entité qui crée et vend ce titre de créance pour lever des fonds. Ce titre symbolise un prêt contracté par l'émetteur auprès des investisseurs, où l'émetteur s'engage formellement à rembourser le montant emprunté, aussi appelé principal, à une date spécifique connue sous le nom de date d'échéance. En complément du remboursement du principal, l'émetteur s'oblige à payer, généralement de manière périodique, un intérêt aux détenteurs de l'obligation. Cet intérêt peut être défini selon un taux fixe, restant constant sur toute la durée de l'obligation, ou selon un taux variable, qui peut fluctuer en fonction de certains indices de référence. Ces paiements d'intérêts sont communément appelés "coupons". Il est important de noter que, dans certains cas particuliers, les obligations peuvent être structurées sans versement périodique d'intérêts, prenant alors la forme d'obligations à zéro coupon.

D’après la loi sur les sociétés commerciales1, « toute société peut émettre des obligations », ce texte a vocation à s’appliquer à toute société présente dans le listing des sociétés commerciales de cette même loi2 :

  • la société en nom collectif ;
  • la société en commandite simple ;
  • la société anonyme et la société par actions simplifié
  • la société en commandite par actions ;
  • la société à responsabilité limitée et la société à responsabilité limitée simplifiée ;
  • la société coopérative ;
  • la société européenne (SE).

Le cas particulier de l’obligation sans intérêt

L'obligation à zéro coupon se distingue par son absence de versement périodique d'intérêts, contrairement aux obligations conventionnelles qui rémunèrent leurs détenteurs à travers des paiements d'intérêts réguliers. Cette catégorie d'obligation est caractérisée par son émission à une décote significative par rapport à sa valeur nominale ce qui signifie que son prix d'achat est souvent inférieur à la somme qui sera remboursée à l'investisseur à l'échéance (cela permet de conserver une attractivité pour les investisseurs malgré l’absence d’intérêt). Ainsi, la différence entre le prix d'émission et le prix de remboursement constituera l'intérêt gagné par l'investisseur.

Le cas particulier de l’obligation convertible

Selon la législation sur les sociétés commerciales, une société peut émettre des obligations convertibles3. Les obligations convertibles sont des obligations classiques qui peuvent à terme, être transformées en capital selon un ratio de conversion prédéfini.

En ce qu’elles induisent intrinsèquement la possibilité qu’un tiers investisseur devienne à terme associé ou actionnaire, l'émission d'obligations convertibles pour toute société à l’exception de la société anonyme doit suivre à la fois les règles concernant la cession de parts ou d’actions ainsi que celles concernant l’agrément des nouveaux associés entrants.

L’émission d'emprunts obligataires par les SARL

Les Sociétés à Responsabilité Limitée (SARL) étant incluses dans la réglementation spécifique aux émissions d'obligations (faisant référence au listing des sociétés commerciales de la loi) bénéficient du droit de procéder à l’émission de tous types d’obligation.

L’émission d'emprunts obligataires par les SARL-S

Les SARL-S, ou Sociétés à Responsabilité Limitée Simplifiée, partagent des caractéristiques communes avec les SARL du fait de leur régime juridique issu de l’application de l’intégralité des lois applicables aux SARL complétées par quelques normes spécifiques pour l’adoption de la forme simplifiée. Les SARLS-S sont principalement destinées aux entrepreneurs individuels et aux projets de moindre envergure et ne peuvent avoir que des personnes physiques comme associés. Elles sont limitées dans leurs activités et ne peuvent pas inclure des activités de détention financière ou immobilière dans leur objet social.

Bien que la loi sur les sociétés ne mentionne pas spécifiquement les emprunts obligataires pour les SARL-S, il parait alors possible qu'elles puissent émettre des emprunts obligataires classiques ou convertibles sous des conditions similaires à celles des SARL.

Du fait de leur objet social limité aux activités prévues par la loi concernant l’obtention d’une autorisation d’établissement, les SARL-S sont dans l’impossibilité de détenir des obligations émises par une autre société (impossibilité d’avoir une activité dans le domaine financier donc interdiction de principe de réaliser une détention d’actifs financiers).

L’émission d'emprunts obligataires par les SCI

Les SCI ou Sociétés Civiles Immobilières (principalement utilisées au Luxembourg pour la gestion de biens immobiliers) revêtent un caractère civil par nature. L’émission d’un emprunt obligataire n’étant ouvert qu’aux sociétés qui sont listées par la loi sur les sociétés commerciales, aucune société civile ne peut selon nous avoir accès à cette forme de financement.

 


1Loi du 10 août 1915 concernant les sociétés commerciales telle que modifiée par la loi du 10 août 2016
2Article 100-2 de la Loi du 10 août 1915 concernant les sociétés commerciales
3Article 100-15 de la loi du 10 août 1915 concernant les sociétés commerciales