L’augmentation de capital
Les sociétés qui ont besoin de financer leur croissance au moyen de fonds supplémentaires peuvent faire appel aux banquiers, aux prêteurs en général au moyen d’une émission d’obligations, ou à leurs actionnaires en ayant recours à une augmentation de capital.
Au Luxembourg, l’augmentation du capital d’une société suppose que toutes les actions souscrites au préalable aient d’abord été libérées1. En effet, l’émission de nouvelles actions pour faire entrer des fonds dans la société ne ferait pas sens si les actions anciennes n’étaient pas au préalable libérées.
Pour être valable, l’augmentation de capital doit être intégralement souscrite et libérée à concurrence du quart au moins dans les SA2 (ou intégralement libérée dans le cas des SARL). La prime d’émission, s’il en existe une, doit être intégralement libérée.
Les actions nouvelles offertes à la souscription en numéraire3 doivent être proposées en premier lieu aux actionnaires existants pour éviter toute dilution contre leur gré. Cette exigence donne naissance au Droit Préférentiel de Souscription (DPS)4. Puisque le DPS est en principe cessible, un actionnaire existant qui ne souhaiterait pas participer à l’augmentation de capital peut soit céder ses droits au profit d’une personne qui n’est pas encore actionnaire mais qui souhaiterait le devenir, soit au profit d’un actionnaire existant qui voudrait participer plus massivement à l’augmentation de capital que sa quote-part initiale dans le capital ne le permettrait. Il n’existe pas de valeur uniforme du droit préférentiel de souscription : son montant est négocié de gré à gré entre le cédant et l’acquéreur. Son prix tend cependant à être proche de la différence entre la valeur économique de chaque action offerte et sa valeur de souscription (compte tenu de la prime d’émission).
La prime d’émission est le montant que les nouveaux actionnaires doivent verser à la société en complément de la valeur nominale de l’action pour l’acquérir dans les conditions de sa valeur économique théorique au moment de l’augmentation de capital. La valeur de la prime d’émission est fixée par le conseil d’administration qui décide de proposer l’augmentation de capital à la souscription. Cette prime d’émission doit être intégralement libérée au moment de l’augmentation de capital.
La prime d’émission et le droit préférentiel de souscription ont le même but : préserver l’égalité entre les anciens et les nouveaux actionnaires. La différence entre la prime d’émission et le droit préférentiel de souscription tiendra essentiellement au fait que le montant de la prime d’émission revient à la société qui émet l’augmentation de capital tandis que le montant du droit préférentiel de souscription (DPS) revient à l’actionnaire qui le cède. La valeur d’un DPS serait, du reste, d’autant plus élevée que le montant de la prime d’émission serait faible ou, inversement, d’autant plus faible que le montant de la prime d’émission serait élevé.
Exemple :
Une start-up luxembourgeoise constituée sous la forme d’une SA au capital de 50.000 EUR (réparti en 1.000 actions de 50 EUR) aurait besoin de lever 1.000.000 d’euros pour asseoir son développement. L’évaluation de la start-up fait ressortir une valeur de l’entreprise à 3 millions d’euros. Par mesure de prudence et de sorte à faciliter la souscription de l’augmentation de capital, le conseil d’administration préfère retenir une valeur de l’entreprise à 2,5 millions d’euros.
Puisqu’il existe 1.000 actions et que la société est valorisée 2,5 millions d’euros par le conseil d’administration pour les besoins de l’augmentation de capital, la valeur théorique de chaque action avant l’augmentation de capital est 2.500.000 ÷ 1.000 = 2.500 EUR.
Une augmentation de capital de 1.000.000 EUR devra donc être souscrite moyennant la création de 1.000.000 ÷ 2500 = 400 actions. Ces actions, au nominal de 50 EUR, seront donc assorties d’une prime d’émission de 2.500 - 50 = 2.450 EUR et il faudra 5 actions anciennes pour avoir le droit de souscrire 2 actions nouvelles.
A l’issue de l’augmentation de capital, la société aura donc un capital de 400 + 1.000 = 1.400 actions de 50 EUR, soit 70.000 EUR assorti dune prime d’émission de 2.450 × 400 = 980.000 EUR.
Étant donné que l’augmentation de capital sera souscrite sur base d’une valorisation de l’entreprise avant l’augmentation de capital retenue pour 2,5 millions, la valeur théorique de l’action, à l’issue de l’augmentation, est égale à (2.500.000 + 1.000.000) ÷ 1400 = 2.500 EUR. Toutefois, puisque la valorisation économique réelle de l’entreprise, avant l’augmentation de capital, ressortait plutôt à 3 millions d’euros, cela situe la valeur économique de chaque action, à l’issue de l’augmentation de capital, à (3.000.000 + 1.000.000) ÷ 1400 = 2.857 EUR. Sachant que les 1.000 actions anciennes donneront le droit de souscrire 400 actions avec un avantage économique théorique de 2.857 - 2.500 EUR = 357 EUR par action , les droits préférentiels de souscription devraient se négocier à 357 × 400 ÷ 1000 = 142 EUR par action ancienne.
L’augmentation de capital s’enregistre, dans la comptabilité de Start up SA, de la manière suivante :
Débit | 513 Banque | 1.000.000 |
Crédit | 101 Capital souscrit | 20.000 |
111 Prime d’émission | 980.000 |
1. Ce principe n’est consacré par aucun texte formel mais résulte d’un usage bien établi.
2. Article 32-1 de la Loi sur les Sociétés Commerciales.
3. Les augmentations de capital moyennant un apport en nature ne donnent pas lieu à un droit préférentiel de souscription (lecture a contrario de l’Article 32-3 (1)) mais impliqueront la surveillance d’un réviseur agréé. Les droits des actionnaires existants sont maintenus au moyen de la « prime d’apport ».
4. L’existence du droit préférentiel de souscription (DPS), de même que celle de la prime d’émission, n’est clairement consacrée par la loi luxembourgeoise que pour les sociétés anonymes.