La comptabilité analytique au Luxembourg: définition, utilité et coûts
La tenue d'une comptabilité analytique n'est pas obligatoire au Luxembourg. Cependant la comptabilité analytique peut être utile et il est donc indispensable de connaître sa définition, son utilité et les méthodes pour déterminer ses coûts avant de l'exploiter.
Jusqu'au développement récent des progiciels de comptabilité, la comptabilité analytique a été longtemps pratiquée par les seules grandes entreprises industrielles, seules capables de maitriser sa complexité et de supporter les coûts de mise en œuvre sauf dans certains cas très particuliers (par exemple les entreprises qui sont éligibles à certaines subventions).
Définition de la comptabilité analytique
La comptabilité générale traite les données par nature, la comptabilité analytique traite ces mêmes données par destination.
Chaque produit généré par l'entreprise sera rapproché des coûts qui ont concouru à sa production (au sens large du terme).
Il n'existe pas de cadre obligatoire pour l'organiser.
Au Luxembourg, il n'y a même jamais eu de cadre légal pour l'organiser. Chez nos voisins, par exemple en France, la classe 9 autrefois réservée au compte de comptabilité analytique rattachée à la comptabilité générale et proposant une nomenclature a du reste disparu aujourd'hui du plan comptable général français.
Chaque entreprise est donc libre de la mettre en place de la manière qui lui convient le mieux. L'entreprise peut opter pour une comptabilité analytique intégrée ou une comptabilité analytique autonome et peut choisir la méthode de détermination des coûts appropriée à son cas.
L'utilité de la comptabilité analytique
La comptabilité analytique a pour but de connaître les coûts des différentes fonctions de l'entreprise, de comparer les bases d'évaluation de certaines immobilisations ou des stocks apparaissant au bilan, d'expliquer les résultats et de les analyser par gamme de produits ou par activité.
La comptabilité analytique est un outil de gestion et de pilotage très efficace pour une entreprise car elle permet de calculer la marge par produit et de décider la promotion ou l'arrêt de la fabrication ou de la commercialisation d'un produit en connaissance de cause.
De ce fait, pour certaines entreprises la comptabilité analytique est quasiment obligatoire du fait de la qualité des informations qu'elle procure.
- Comment une entreprise implantée dans de nombreux pays peut-elle consolider les résultats par activité ou produit sans l'aide d'une comptabilité analytique ?
- Comment un promoteur immobilier dont l'activité se déroule sur plusieurs exercices peut-il connaître le coût et donc la plus value réalisée sur la vente de l'immeuble qu'il construit et commercialise sans le recours à un système de comptabilité analytique ?
- Comment un constructeur automobile peut-il déterminer d'une part la valeur des outils spécifiques à la production d'un modèle qu'il va immobiliser, ou le prix de revient de la voiture commercialisée sans une comptabilité analytique adéquate ?
- Comment les entreprises imposées à la TVA sur la marge et réalisant des opérations complexes (les agences de voyage par exemple) peuvent-elles déterminer cette marge sans recours à une comptabilité analytique ?
Les méthodes de détermination des coûts
Les principales méthodes utilisées sont: la méthode des coûts complets, des coûts partiels et des coûts standards.
Chaque méthode correspond à une analyse plus ou moins fine des charges de l'entreprise selon leur sensibilité à l'activité de l'entreprise. Les charges sont analysées en charges variables ou fixes et chaque fois en charges directes ou indirectes.
1- La méthode des coûts complets
Cette méthode a pour objectif d'expliquer le résultat de l'entreprise en rapprochant pour chaque produit le prix de vente et le coût de revient.
Pour utiliser cette méthode, il faut effectuer un découpage de l'entreprise en centres de travail (sections) dans lesquels seront imputés les coûts de l'entreprise au moyen de clés de répartition. Les charges de la comptabilité générale seront ensuite réfléchies dans ces sections.
La société ABC fabrique et commercialise 3 produits: A, B, C.
Produit A | Produit B | Produit C | Total | |
Ventes | 200 000 | 1 100 000 | 700 000 | 2 000 000 |
Coût complet | 250 000 | 600 000 | 720 000 | 1 570 000 |
Résultat | -50 000 | 500 000 | -20 000 | 430 000 |
Cette méthode, même si elle permet de contrôler les coûts à tous les stades de la fabrication, est très lourde et difficile à mettre en place et se révèle arbitraire dans l'imputation des frais généraux de l'entreprise.
2- La méthode des coûts partiels (en anglais direct costing)
Cette méthode se divise en 2 étapes:
- Le coût variable
Dans cette méthode on ne prend en compte que les charges directement liées au volume d'activité de l'entreprise et on détermine ainsi une marge sur coût variable.
Pour l'exemple ci-dessus l'analyse des charges donne le tableau suivant :
Charges |
Produit A |
Produit B |
Produit C |
Total |
Variables directes | 200 000 | 400 000 | 330 000 |
930 000 |
Variables indirectes | 30 000 |
70 000 |
70 000 | 170 000 |
Fixes directes | 30 000 | 120 000 | 150 000 | |
Fixes indirectes | 20 000 | 100 000 | 200 000 | 320 000 |
Total | 250 000 | 600 000 | 720 000 | 1 570 000 |
L'analyse de la marge par coût variable permet d'établir les résultats suivants:
Produit A | Produit B | Produit C | Total | |
Ventes | 200 000 | 1 100 000 | 700 000 | 2 000 000 |
Charges variables | 230 000 | 470 000 | 400 000 | 1 100 000 |
Marge sur coût variable | -30 000 | 630 000 | 300 000 | 900 000 |
L'étape suivante consiste à prendre en compte les charges fixes directes permettant de déterminer:
- le coût spécifique (en anglais direct costing évolué)
Dans notre exemple les résultats deviennent:
Produit A | Produit B | Produit C | Total | |
Ventes | 200 000 | 1 100 000 | 700 000 | 2 000 000 |
Charges variables | 230 000 | 470 000 | 400 000 | 1 100 000 |
Marge sur coût variable | -30 000 | 630 000 | 300 000 | 900 000 |
Charges fixes directes | 30 000 | 120 000 | 150 000 | |
Résultat | -30 000 | 600 000 | 180 000 | 750 000 |
Ces méthodes permettent: de mesurer la rentabilité de manière précise, de mettre en évidence les questions d'utilisation des capacités de production de l'entreprise et de son dynamisme commercial, tout en étant simple à mettre en place.
3- Les coûts standards
Cette méthode consiste à prendre la question à l'envers et à déterminer à l'avance ce que devraient être les coûts des produits fabriqués. Ces coûts sont ensuite comparés aux coûts réels tels que enregistrés en comptabilité générale.
Cette méthode cumule de nombreux avantages, en particulier elle permet une sortie rapide du résultat (il suffit de connaître les quantités produites), elle permet aussi de suivre les marges théoriques, les contributions des produits, elle gomme les variations d'activités.
Notons enfin que chacune de ces méthodes a connu des évolutions qui permettent de mieux correspondre à la spécificité de chaque entreprise et que l'informatisation de toutes les entreprises, y compris les petites, permet aujourd'hui, et à moindre effort, de développer une comptabilité analytique. Il serait dommage de se passer des informations qu'elle permet d'obtenir.